Je réclame le droit de prescription pour les repentances en tous genres qui sont plus proches de l'autoflagellation que du pardon.
Je vais exiger une repentance du Vatican pour les Croisades, une autre du gouvernement français pour les Carmélites exécutées sommairement pendant la Terreur... avec qq milliers d'autres, une autre des Anglais pour les traitements inhumains et sévices divers exercés contre les marins français sur des pontons infâmes après les défaites navales d'Aboukir et de Trafalgar, une autre de Blair dont les ancêtres ont brûlé Jeanne d'Arc, une sainte, faut oser ! etc, etc, etc.
Et pourquoi pas une de Berlusconi dont certains prédécesseurs ont asservi, l'Egypte, la Grêce, même la Gaule barbare... et combien d'autres. Au passage je lui intenterai un procès pour génocide contre les Carthaginois... à moins qu'il se repente... au nom des Romains d'il y a deux millénaires
J'oubliais : une repentance de Chirac successeur d'un roi qui fit griller ses compatriotes cathares. Languedociens ! aux prétoires, portez plainte contre X !
J'ai un problème : comment faudra-t-il évaluer les préjudices, en écus, en drachmes, en livres ou en sesterces ?
Pendant combien de générations faudra-t-il imputer aux enfants les fautes de leurs pères ?
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Les héritiers de Lénine
D'Alain-Gérard Slama
[10 décembre 2005]
La France était un pays où l'on pouvait encore exister comme individu sans avoir à exciper d'une religion, d'une race ou d'une appartenance. C'était trop beau. Il ne se passe plus de semaine sans que l'on voie surgir un nouveau groupe de pression à caractère ethnique ou religieux. Le dernier avatar de cette régression de l'universalisme républicain est l'inauguration à l'Assemblée nationale, le 26 novembre, d'un conseil représentatif regroupant une soixantaine d'associations noires (le Cran). Ce conseil, qui
prétend identifier une politique et une couleur de peau, n'a pas l'excuse d'être né dans la fournaise des banlieues. Il est issu d'un colloque de l'Ecole des hautes études en sciences sociales. Il est animé par des intellectuels antillais et africains de gauche et de droite, venus, pour certains, des mouvements homosexuels. Il a reçu la bénédiction de Manu Dibango et de Mme Taubira. Il prétend répondre à un «besoin» de reconnaissance et de mémoire. Il ambitionne surtout de peser assez lourd dans le débat public pour imposer ses conditions aux candidats à la prochaine élection présidentielle. On aurait tort de sous-estimer la gravité de la menace. Elle est à la mesure d'un discours qui renoue avec le fond et
la tactique du léninisme, et qui dévoile ainsi son inspiration fondamentalement totalitaire.
Le fond se retrouve dans l'argument qui fait de la loi l'expression des catégories dominantes. Comme chez Lénine, les droits formels reconnus par la démocratie à chaque citoyen sont considérés comme nuls et non avenus aussi longtemps qu'ils n'ont pas été traduits dans les faits pour tous. On renie
ainsi l'universalisme, sous prétexte qu'il n'a pas empêché la colonisation, et qu'il a lui-même servi de prétexte ; on remet en cause le principe d'égalité sans distinction d'origine, de religion ou de race, au motif que le racisme n'a pas été éradiqué dans les sociétés modernes ; on rejette la laïcité, en invoquant l'inégalité d'accès des cultes à la pratique religieuse dans l'espace public ; on va même jusqu'à répudier la séparation entre le public et le privé, le politique et le culturel, dans le droit fil
de la pensée totalitaire.
La tactique se reconnaît dans la rhétorique typiquement léniniste qui consiste à retourner contre la démocratie les principes qui la fondent en revendiquant pour soi la liberté que l'on refuse aux autres. Ainsi la République est-elle accusée par le Cran d'être intolérante, voire, c'est un comble, «communautariste», alors que la passion identitaire est considérée par eux comme un facteur positif d'intégration quand elle est le fait des minorités ethniques ou sexuelles. Enfin, ces groupes activistes ont retenu de l'âge d'or du communisme l'art d'utiliser les courroies de transmission associatives et le soutien d'une intelligentsia et de médias tétanisés par la crainte d'être dénoncés comme «réactionnaires». On ne voit pas sans anxiété renaître dans la France de 2005 le climat étouffant des années 1950, qui conduisit Raymond Aron à écrire l'Opium des intellectuels.
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le : samedi 10 décembre 2005